Apprendre mieux

Un blog de Bernard Lamailloux – ingénierie pédagogique et artistique

Mes salutations les plus… municipales ?


Un village,
C´est la grande famille
Où les garçons, les filles
Se marient à vingt ans
Un village,
C´est chacun, sa chacune
Car, à la pleine lune
Le lit est bien trop grand…

_
Ah, les élections municipales… c’est toujours un événement de taille dans mon village. Un peu plus de 4000 habitants, situé en région PACA, tout près de la « frontière » de quatre départements (04, 13, 13 et 84), côté Bouches du Rhône. Mon village n’a rien de bien particulier, si ce n’est la douceur de vivre que je ressens depuis le fond de ma petite pinède. Après avoir pas mal bourlingué sous des cieux moins cléments, sentir la caresse du soleil et respirer l’odeur des pins suffit amplement à mon bonheur.

Un village,
C´est la pauvresse en cloque,
Les sourires équivoques
De tout´s les « braves » gens
Un village,
C´est une fausse légende
Racontée par les grandes
Aux tout petits enfants…

Depuis 25 ans que je vis ici, je ne me suis jamais impliqué dans la vie locale de ce lieu qui revêt bien des aspects du célèbre « petit village gaulois » d’Astérix… La seule fois où j’ai vaguement essayé, peu après mon emménagement, un gars du cru m’a refroidi en deux phrases. La première était du style « Ah oui, mais avec vous c’est toujours pareil, vous ne faites jamais rien comme il faut… ». La deuxième est venue tout de suite après, alors que je m’étonnais de ce que mon commensal me donne soudain du « vous », alors qu’habituellement on se disait tu. Il a alors eu cette phrase magnifique, véritable cri du cœur : « Oui, vous, les… aixois ! ».

Cela m’a fait sourire, enfin, sourire un peu jaune, moi qui suis né à Alger, ai grandi à Marseille, puis vécu à Paris, puis Rouen (…les hasards de la vie m’ont en effet amené à porter successivement mes valises « aux quatre coins de l’hexagone », expression d’ailleurs attribuée à un homme politique méridional), et même dans la plaine des Vosges ! Vu d’ici, Aix-en-Provence n’est que… disons la ville moyenne la plus proche. En y réfléchissant je me suis souvenu que j’y avais effectivement bien passé les trois premières années de ma vie d’étudiant, au milieu des années 1970… Mais jusqu’alors j’ignorais que cela avait laissé de telles traces !

Un village,
C´est le curé en chaire,
Le docteur et le maire
« Qui sont pas fiers pourtant »
Un village,
C´est la guerre et la haine,
Entre Albert et Eugène,
Pour un lopin de champ…

Aux débuts de ma vie de néo-rural, j’avais également été frappé par un dessin d’humour, trouvé dans une feuille de chou locale, tenue (…déjà !) par une équipe d’opposition municipale, et qui faisait dialoguer deux vieux ossements qui venaient censément d’être exhumés par des archéologues aux abords du village. Le premier os déclarait « Je viens de subir une datation au carbone 14, je sais maintenant que je suis vieux de 4 millions d’années ». Et le second lui répondait à peu près « Ah, c’est bien, désormais on peut dire que vous êtes presque d’ici, alors ! »

Ces petits événements (avec quelques autres) m’ont bien vite convaincu de suivre le conseil que Raimu prodiguait à son fils dans la célèbre pagnolade Fanny, lorsqu’il lui écrivait « Quand tu vas commencer à mesurer le fond des océans, fais bien attention de ne pas trop te pencher, et de ne pas tomber par dessus bord et là où ça sera trop profond. Laisse un peu se pencher les autres ». D’une certaine façon, j’ai moi-même pris le parti de « laisser se pencher les autres » pour ce qui concerne les questions de citoyenneté locale.

Un village,
N´en déplaise à Pagnol
Qui s´est payé not´ fiole
Avec son grand talent
Un village,
C´est Marius en vitrine,
C´est Fanny aux cuisines
Avec tous les enfants…

Bien m’en a pris ! La toute récente élection municipale a en effet vu s’opposer deux listes :

La première de ces listes est elle de l’équipe  sortante. Appuyée par ce qu’on pourrait appeler des féodalités locales qui savent depuis des lustres « veiller au grain » avec une ardeur consommée, elle fait notamment un tabac auprès du troisième âge… elle n’est installée que depuis une mandature, mais elle a succédé à une autre liste du même tonneau, qui elle-même… et ainsi de suite, depuis des temps qu’on devine immémoriaux. Les conseillers de feu le président Georges Pompidou avait inventé en leur temps une expression censée permettre à leur patron d’incarner ce phénomène aux yeux de son électorat :  « Le changement dans la continuité ». Eh bien chez moi, nous y sommes encore : les têtes de liste changent, mais on sent très nettement que dans la durée, les mêmes trois ou quatre baronnies locales (que tout le monde connaît) continuent à tenir solidement les rênes, dans ce joli coin de « Douce France », à l’image de ce qui se passe dans tant d’autres petits bouts de paradis tricolore.

La deuxième liste, quant à elle,  est en majorité composée de personnes plus nouvellement implantées ici (un peu comme moi), et qui représentent une catégorie de population qui progresse (…en nombre, s’entend) lentement mais sûrement au fil des ans. C’est d’une certaine façon la n-ième vague de tentative de poussée de sang neuf, à l’image de ces fameuses colonies de champignons qui naissent après la pluie, prenant soudain une place étonnamment grande (bien que souvent éphémère) dans la forêt… une histoire toute simple et toute prévisible de biodiversité sociologique, en quelque sorte. Il n’y a rien d’étonnant à cela. Personnellement, je connais bien évidemment des personnes dans l’une et l’autre de ces listes, et suis bien placé pour savoir que dans chacune d’elles il existe des gens tout à fait estimables et dignes de foi, côtoyant d’autres individus dont les incisives me semblent avoir une fâcheuse propension à rayer systématiquement les revêtements de sol les plus résistants…
_

Mon impression sur la gestion de la commune  par ces équipes successives depuis que je suis là ? Eh bien là aussi je serais bien incapable de trancher. Au vu de leurs réalisations (…ou de ce que j’en perçois), j’ai un peu le sentiment que le pire y côtoie le meilleur. Pour ne citer que le meilleur, j’ai par exemple vu sortir de terre en 1998 une magnifique bibliothèque municipale. Pendant toute la durée des travaux, j’étais persuadé que des martiens se poseraient sur son toit le jour de l’inauguration, et en repartiraient formels en déclarant qu’il ne pourrait y avoir là aucune forme de vie…

Eh bien la suite m’a donné tort, puisque l’endroit en question est à mes yeux un des lieux les plus magiques, agréables et enrichissants que j’ai connus dans ma (déjà longue) vie. Qui plus est, cette bibliothèque est animée par une équipe composée de personnes plus que compétentes, et au cœur gros comme ça…

_

Un village,
C´est ces fêtes espagnoles
De violence et d´alcool
Pour les adolescents
Un village,
C´est les futures milices
Des chasseurs qui ratissent
Les lièvres et les gitans…

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insolite - avions au-dessus d'un nuage issu d'une tasse 506x507Ces toutes dernières élections municipales ont pourtant donné lieu à un de ces événements qui me manquent jamais de me déconcerter, et dont j’ai beaucoup de mal à savoir s’il faut en rire ou en pleurer : Il faut d’abord savoir que l’équipe sortante a remporté l’élection dès le premier tour. Apparemment, donc, le temps de mai 68 n’est pas encore arrivé jusque par chez nous, décalage horaire oblige. A franchement parler j’ignore ce que cela aurait donné. J’imagine simplement que ce sera pour une autre fois et que ce genre de relève est inéluctable. Juste une question de temps. Ici, la nature a tout son temps, justement… J’imagine également que l’équipe sortante (et – donc – reconduite) a dignement fêté sa victoire. Chez certains partisans, la nuit a dû être longue, voire passablement arrosée (Quelqu’un connaît-il la chanson « Chasse, pêche et tire-bouchon », de mon amie Flavia Perez ? …).

C’est là que ça se passe : le lendemain je me suis aperçu de ce que quelques-uns de ces intrépides militants avaient eu une drôle d’idée… En effet, à l’image de beaucoup de mes concitoyens, j’ai eu la surprise de découvrir, dès le fameux « lendemain de la victoire », une espèce de guirlande composée de vieux vêtements accrochés à des cintres, guirlande stratégiquement implantée bien en face de la mairie, contre le monument aux morts. Inratable. De loin, j’ai trouvé l’idée excellente, me disant « Tiens, une espèce de happening, d’installation artistique, annonçant sûrement un quelconque événement culturel …(exposition, pièce de théâtre… que sais-je encore ?) »._

 

Quel naïf indécrottable je fais ! La vérité était beaucoup moins drôle, figurez-vous qu’il s’agissait juste d’une mise en scène au goût douteux, destinée uniquement à faire enrager les perdants au vu et au su de tous. L’idée aurait pu m’être sympathique… si elle n’avait été traitée de manière aussi… disons pesante. Imaginez : sur nombre de ces vêtements, nos joyeux animateurs de noces et banquets n’avaient pas trouvé mieux que d’accrocher des pancartes pour railler chacun des membres de la liste battue qui venait, donc, de « prendre une veste », en inventant à chaque fois une blague oiseuse à partir de… son nom ! Comme dans les cours de récréation, on cherchait à l’évidence à atteindre (plus ou  moins consciemment) l’autre là où ça le touche le plus, c’est-à-dire au niveau de son identité… _


Un village,
C’est ce bloc unanime
A tirer grise mine
A l´étranger au clan,
Un village,
C´est l´idiot, que lapident
Les notaires placides
Qui passent en ricanant…

_

On croyait rêver… mais sur un mode très nettement  « Very bad trip »… Je n’ai pas pu m’empêcher alors de penser à l’aphorisme attribué à Albert Einstein : « Il n’y a que deux choses qui soient infinies: l’univers et la bêtise humaine. Et encore, pour l’univers, je ne suis pas sûr ». Ne possédant pas les connaissances de cet illustre monsieur, j’ignore totalement pour ma part si la bêtise humaine est infinie ou pas… En revanche, quelque-chose me dit qu’elle est beaucoup plus insondable que les fonds des océans cités plus haut… Si j’avais eu les « auteurs » de cette pantomime en face de moi, je leur aurais peut-être fait part de ma consternation… et à la réflexion peut-être pas, tant j’aurais craint de m’entendre rétorquer… que je manque d’humour !

Depuis lors, j’ai appris que des comportements tout aussi affligeants s’étaient produits un peu partout dans d’autres communes, ici et là. Certains d’entre eux sont infiniment plus préoccupants que celui que je viens de rapporter ici, et d’une certaine façon je me réjouis (si l’on peut dire), disons « en creux », du côté « potache » et somme toute relativement inoffensif de cette blagounette aux allures de canular pour amateurs de noces et banquets. À la réflexion, je me demande carrément s’il en existe des municipalités ayant échappé à ce genre de manifestations si peu glorieuses…

Un village,
Pas plus qu´une ville,
N´est cet îlot tranquille
Que je croyais pourtant
Un village,
C´est, grossi à la loupe
Une harde ou un groupe
De petits commerçants…

Allons, ne soyons pas trop pessimistes. De plus en plus, un peu partout, dans le monde, des voix s’élèvent pour faire la promotion des comportements inspirés par la bienveillance et la coopération, et pour tenter de nous ouvrir les yeux sur l’inanité des comportements ayant pour base la malveillance et l’esprit de compétition (lorsque celle-ci prend tous les aspects d’une lutte à mort), en pointant du doigt ce qu’elles ont de plus délétère, tant pour les personnes visées, que pour les auteurs de ces comportements eux-mêmes, et pour finir pour l’humanité tout entière, à bien y réfléchir.

Mais bon… le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il y a encore du boulot, vous ne trouvez pas  ?

Tiens, je vous laisse admirer la magnifique photo de campagne publiée il y a peu par… l’équipe en place, donc.

conseil municipal posant pour une photo de classe (enfin, si l'on peut dire)

Le conseil municipal de mon village posant pour une photo de classe (si l’on peut dire)

Pour ce qui me concerne, j’assume parfaitement n’être qu’un vieux gamin, surtout après l’avoir tant de fois clamé haut et fort dans ces lignes. En même temps, force m’est de constater avec désarroi qu’on ne peut être jeune qu’une fois… mais immature toute sa vie.

Bien à vous,

Bernard

PS : Les incises sont extraites de la chanson « Un village » d’Henri Tachan, dont on peut lire l’intégralité des paroles ici et entendre la musique . Merci à Omer Sainte, ami de longue date sans qui je ne connaitrais pas ce morceau…

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6 réflexions sur “Mes salutations les plus… municipales ?

  1. Le , Olivier a dit:

    Bernard,

    Deux points :

    Un commentaire pour souligner finalement l’importance de ton geste par ce billet. Merci à toi et voici pourquoi :

    Tous ces nombreux comportements perdurent, car au fond, nous baissons tous la tête sans rien dire et en passant notre chemin… Et cela donne finalement raison par défaut aux auteurs de telles actions.

    La réprobation générale permettrait de diminuer radicalement ce phénomène…comme auprès des enfants les sermons !

    Mais nous ne répondons jamais. Et je crois aujourd’hui que c’est à notre grand tort et surtout c’est NE PAS défendre notre démocratie.

    Ce qui m’amène au second point : Pour avoir vécu quatre campagnes municipales (depuis 1995) dans le village familial (donc du côté d’une des trois baronnies, on choisit pas sa famille!), et ces inéluctables reproductions de résultats dans les villages que tu constates également, j’en suis venus aujourd’hui (donc après presque 20 ans et beaucoup de péripéties (trahison, victoire, défaite, baroud d’honneur, etc.) à me poser sérieusement la question suivante :

    Notre système actuel d’élections permet-il réellement de faire émerger des personnes sincères et profondément empathique ?

    A ce jour je dois constater que notre système de compétition électorale favorise grandement les personnes vicieuses, la réussite des coups tordus, la lâcheté, bref met au commande des personnes avec un caractère du mauvais côté de notre humanité à des degrés plus ou moins importants.

    C’est d’autant plus curieux que nous nous accordons à remarquer que pour réussir en politique il faut (de base) être pourri!

    Mais voulons-nous vraiment continuer ainsi ? ET SURTOUT est-ce bon pour nous globalement, notre société et notre humanité ??????

    • Bonjour Olivier.

      Merci encore, une fois de plus, de ton point de vue éclairant.

      Oui, je l’ai dit clairement, je fais partie, finalement, de ceux qui préfèrent « baisser la tête » (au niveau de la métaphore, je préfère dire que « je m’éloigne à grandes enjambées », mais cela revient au même, dans le fond)…

      Est-ce que cela donne finalement raison par défaut aux auteurs de telles actions, comme tu le dis ? A défaut de leur « donner raison », je préfère me dire que cela leur donne « le champ libre », ce qui n’est pas tout à fait la même chose…

      Qu’ils continuent à jouer entre eux à celui qui pissera le plus loin si ça leur chante, leur guerre ne m’intéresse nullement !

      En 1978, Philippe Val, alors humoriste et chanteur, écrivait ceci : « Facile de nous […] ranger avec Céline, Marcel Aimé, Jacques Brel… Seulement voila, on est pas assimilables. Eux, ils ont dit, le monde est pourri, il n’y a rien à faire, contentons nous de ce que on a et soyons anticonformistes avec talent. Nous, l’anticonformisme esthétique, on s’en fout, on se contente pas de ce qu’on a. Je cherche, je me bats, je milite. Avec ce que j’ai, avec ma tête. Je ne m’éloigne pas en ricanant avec talent de la machine à hacher de la société de production. Je reste là planté, je veux casser les rouages. »

      On sait ce qu’il est advenu de ce monsieur par la suite… une brillante carrière à la tête de Charlie Hebdo, puis la direction de France Inter, où il fut nommé par Nicolas Sarkozy, sur l’intervention de Sa Majesté Carla son épouse, si bien à l’aise dans le milieu de la gauche caviar… Et la conduite, disons controversée, de ce monsieur, quelques décennies plus tard, dans cette vénérable maison, a laissé beaucoup de monde sur un souvenir… disons « amer », pour ne pas être trop cruel. Alors, où est-il, ce monsieur « pas assimilable » qui entendait montrer sa façon de penser à tous les passants en « cassant les rouages » ? ah la bonne blague !

      Si je remonte le temps de nouveau, je tombe volontiers sur un écrit de la même époque, signé par Pierre Desproges, que j’adore : « L’humanité est un cafard. La jeunesse est son ver blanc. Autant que la vôtre, je renie la mienne, depuis que je l’ai vue s’échouer dans la bouffonnerie soixante-huitarde où de crapoteux universitaires grisonnants, au péril de leur prostate, grimpaient sur des estrades à théâtreux pour singer les pitreries maoïstes de leurs élèves, dont les plus impétueux sont maintenant chefs de choucroute à Carrefour ».

      Allons, franchement, Desproges pensait-il réellement que « l’humanité est un cafard » ? Oui… et en même temps, non. De mon point de vue, c’est très compliqué, à l’image du bonhomme. Mais je préférerai toujours me rapprocher de quelqu’un qui exprime ainsi sa difficulté d’être parmi les humains que me tenir chaud avec les pinocchios qui m’asséneront avec la bouche en cœur des inepties à l’emporte-pièces d’où il ressort que tout être humain est leur frère, et que la planète est leur maman, car je trouve ça extrêmement suspect. C’est peut-être idiot, mais c’est ainsi…

      Tout cela pour dire que je suis maintenant fatigué de croire en les vertus de l’organisation publique, ou même de l’action publique. A mes yeux il n’existe que des individus dignes de foi, disséminés ici et là (et certainement pas regroupés en je ne sais quel endroit de l’échiquier politique). A mes yeux, toujours, toute tentative d’organisation de la vie en commun est vouée, sinon à l’échec, du moins à de bien piètres arrangements, dans lesquelles, effectivement, les individus en question n’ont définitivement pas leur place. Et bien sûr, ce sont toujours les mêmes, au final, qui tiennent le haut du pavé, que ce soit dans une organisation totalitaire ou dans un système de fonctionnement « à main levée ». La dictature tue les gens au canon ou à la chambre à gaz, mais la démocratie les fait pourrir à petit feu, beaucoup plus lentement, mais avec le même résultat à la fin. Et surtout, dans la quasi-totalité des cas, les derniers à survivre sont ceux qui savent le mieux utiliser leur égoïsme et leur duplicité. Voilà une manière un peu curieuse de rallier le « tous pourris », dont je ne suis effectivement pas bien éloigné, à certains égards…

      J’ai en effet tendance à penser que ceux d’entre eux qui se sentent « d’y aller » sans être nécessairement pourris finissent tôt ou tard soit par se faire éjecter du système, soit par être irrémédiablement contaminés par la muflerie ambiante, au nom du fameux principe de réalité qui a si bon dos…

      Je suis bien obligé de constater ceci : si on met une pomme saine au milieu d’un tas de pommes pourries, elle finira par pourrir. Mais si on met une pomme pourrie au-milieu de tout un tas de pommes saines, c’est elle qui finira (au bout d’un temps plus important, mais qu’importe) par pourrir les autres, et non l’inverse, n’en déplaise aux évangélistes de tous bords. Pas étonnant, comme je le disais dans l’article, qu’il « y ait du boulot », donc… Ce que l’idiot met une seconde à détruire, le sage le reconstruit toujours… mais il faut plusieurs vies.

      Et ceci se vérifie dans tous les groupes humains, dès qu’il y a le moindre enjeu, le moindre bout de gras à se disputer. Dans la moindre collectivité, la moindre entreprise, le moindre petit bureau… les brutes se portent à merveille, s’en sortent sans coup férir, et tirent toujours leur épingle du jeu, tu l’as d’ailleurs constaté tout comme moi…

      Ainsi, on verra toujours fleurir ici et là des vocations de chefaillons, de grands stratèges, de Don Quichotte luttant contre les moulins à vent, et aussi de braves gens qui préféreront finalement aller se faire voir ailleurs à chaque fois qu’il y a moulon dans le panier de crabes…

      Personnellement, je préfère y regarder à deux fois avant de rétorquer à ces derniers qu’ils font la politique de l’autruche, car je crains fort d’être moi-même convaincu, pour ce qui me concerne, que c’est la seule qui tienne la route.

      Et lorsque un bienheureux m’oppose, la bouche en coeur, que « si tout le monde pensait comme moi, le monde irait encore moins bien », je ne peux jamais m’empêcher de me dire que, contrairement aux idéalistes de tout poil qui décidément me chauffent l’entendement, je n’ai aucune, mais alors aucune intention de pousser « tout le monde » à « penser comme moi », justement, non mais quelle outrecuidance… comment peut-on fonctionner ainsi ? Allez vous étonner après ça que je me sente un extraterrestre parmi mes frères les humains ?

      Aussitôt après, je me dis en général que le fonctionnement des idéalistes n’est pas beaucoup plus glorieux que le mien, si on veut bien gratter au-delà de la surface des choses… Alors, à chaque fois que je fais face à un de ces entonneurs de « si tout le monde… », je ne peux en général pas m’empêcher de penser que le jour où les cons voleront, il décrochera sûrement un poste de chef d’escadrille, ce qui constitue un bon début dans la course sur l’échelle du « miracle de la vie »…

      Je me hâte de préciser que je ne te range aucunement dans cette triste catégorie, et qu’au-delà de mon indécrottable pessimisme j’ai besoin de sentir la présence réconfortante de gens qui croient en la possibilité de faire tout de même quelque chose.

      Merci à toi d’exister, l’ami !

  2. Je ne connaissais pas Henri Tachan, une voix profonde et chaude, des textes bien écrits. Merci beaucoup.
    J’ai beaucoup aimé cet article. Je vis et j’enseigne en Italie où j’ai tenté cette semaine d’expliquer à mes étudiants le fonctionnement des municipales, les partis … dur, dur. Cet article dépasse de loin, par sa profondeur, la meilleure analyse du meilleur expert en politique.

  3. Waouw ! Que dire, sinon que je suis rouge de confusion… C’est aujourd’hui mon anniversaire, et vous m’avez fait là un de mes plus beaux cadeaux !
    Baci

  4. Magnifique, Bernard !
    Tant pour l’article en lui-même que pour le commentaire.
    J’ai oscillé d’un paragraphe à l’autre, entre poster une réflexion et son abandon… Et au dernier mot, c’est finalement vous qui l’avez eu.
    Toutes mes idées venaient d’être traitées. Non pas que je puisse écrire que je sois en tout point d’accord avec vous, mais plutôt au sens que je n’ai rien trouver à dire de plus « éclairant ».

    Une confidence tout de même :
    Pour ces élections, c’est la toute première fois que je me suis déplacé dans l’unique objectif de voir apposer un tampon sur ma carte d’électeur ; en respect de nos aînés qui se sont tant battus pour obtenir le droit de vote…
    C’est idiot, j’en conviens. J’en reste encore fort marri, et pourtant non repentant !

    Pascal

  5. Bonjour Pascal, merci tout d’abord pour votre appréciation qui me va droit au cœur, et je vous assure que ce n’est pas une formule. Plus le temps passe, et plus je me gratte la tête au vu de ce que je nous découvre de points communs…

    Jugez plutôt : je trouve par exemple que, contrairement à ce que vous écrivez, il n’y a pas de quoi être « fort marri » (ou alors je vais faire le deuxième…) quand vous affirmez vous être déplacé jusqu’aux urnes, cette fois-ci « […]dans l’unique objectif de voir apposer un tampon sur [votre] carte d’électeur ; en respect de nos aînés qui se sont tant battus pour obtenir le droit de vote« .

    Eh bien, ce disant, vous décrivez mieux que je ne saurais le faire moi-même l’état d’esprit dans lequel je me suis moi-même trouvé lors ce ces dernières élections…

    Mieux : aussi navrant que cela paraisse (y compris à mes propres yeux !), c’est dans ce même état d’esprit que je me trouve systématiquement lors de chaque élection, et ceci depuis que je suis en âge de voter! Car il en va (pour ce qui me concerne) des élections comme des grosses bêtises : aussi idiot et paradoxal que cela puisse paraître, je n’en rate pas une !

    Pouvoir, sinon émarger à un parti, du moins m’identifier à un groupe, fût-ce celui des abstentionnistes, serait-ce (pour moi) une source de satisfaction ?

    Au train où vont les choses, il y a fort à craindre que je ne le sache jamais…

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