Pédagogie augmentée avec Yann Minh – Cliquez sur l’image pour afficher l’événement
Bonjour
Par les temps qui galopent, plus n’est besoin de prouver que la pédagogie est une chose bien trop sérieuse pour être confiée aux seuls spécialistes des sciences de l’éducation.
Dans cette perspective nous avons déjà évoqué ici à plusieurs reprises les ponts qu’il était possible (et même souhaitable) de jeter entre pédagogie et jeux, pédagogie et mieux-apprendre, pédagogie et développement personnel et même pédagogie et tartufferie, pédagogie et sites de rencontres, ou pédagogie et humour !
Aujourd’hui il va être question de rapprochements entre pédagogie et… mondes virtuels !
Mais qu’est-ce qu’un monde virtuel, au juste ?
Rappelons qu’un monde virtuel est un monde créé artificiellement par un logiciel informatique et pouvant héberger une communauté d’utilisateurs présents sous forme d’avatars ayant la capacité de s’y déplacer et d’y interagir.
Jusqu’à il y a peu, je n’avais entendu parler des mondes virtuels que par le biais de «Second Life», dont j’avais entendu dire (comme tout le monde) qu’il s’agissait d’une espèce de monde parallèle dans lequel divers schizophrènes azimutés avaient l’habitude de se réfugier (alors que de nos jours, nous ne connaissons même pas notre voisin de palier, n’est-ce pas ma bonne dame ?) pour aller retrouver (hum, si on peut dire…) des asociaux de leur type. C’est sûr que dit comme ça, ça ne fait pas trop envie…
Sur le pont d’Avignon, on y danse, on y danse,
…et sur les mondes virtuels, on y donne des conférences !
Et puis il y a quelques semaines (mardi 19 février dernier), voilà que sans crier gare (…pourquoi l’aurait-il fait ?) mon ami Marco Bertolini m’invite à une conférence qu’il animait, avec pour sujet l’histoire de la pensée visuelle.
En cherchant à savoir où se tenait cette conférence, quelle ne fut pas ma surprise de constater qu’elle avait lieu dans… un monde virtuel !
Passé ma première surprise, j’ai voulu en apprendre plus, et voici ce que j’ai découvert : Il s’agissait en fait d’une conférence virtuelle proposé sur plateforme Open Simulator, dans la grille de Francogrid, sous la houlette de Métalectures. Pour s’y rendre, nous étions invités à emprunter notre viewer préféré, à savoir «Imprudence» (sic !).
Quel vélo ? Quel cheval ?…
En lisant tout ceci je me demandais si je n’étais pas plongé en pleine histoire d’Alice aux Pays des merveilles, et si, pendant qu’on y était, un lapin ou un raton laveur posté à l’entrée n’allait pas nous proposer un verre de sirop de lames de rasoir ou une louche de purée de scie à métaux… En d’autres termes, le moins que l’on puisse dire est que tout cela nécessitait quelques explications pour le profane que j’étais, et que je demeure encore sur bien des points. Ces explications, les voici donc :
OpenSimulator, souvent appelé OpenSim, fait partie de ces fameux mondes virtuels, dont l’ensemble fait partie de ce qu’on appelle parfois le Web 3D. Concrètement, OpenSim est un serveur open source utilisé pour héberger des mondes virtuels. Il est parfois présenté comme l’alternative libre de SecondLife.
Une grille est un petit bout de monde virtuel dans lequel on se balade en utilisant soit des noms de lieux soit des coordonnées altitude/longitude de type GPS. Lorsque plusieurs grilles parviennent à se connecter entre elles, on parle d’hyper-grilles.
FrancoGrid est une communauté francophone de passionnés des mondes virtuels qui ont créé une grille accessible dans le monde OpenSimulator.
MétaLectures est le premier environnement « web 3D immersive » conçu pour présenter, expérimenter et développer des solutions innovantes dans l’univers du livre et de la lecture francophones, et explorer de nouvelles formes de médiation autour du livre.
Imprudence est un viewer (semblable à un navigateur pour monde virtuel, si on veut, sauf qu’en plus de nous permettre de nous balader un peu partout il est conçu pour nous aider à piloter éventuellement les mouvements et le comportement de notre avatar, ainsi que mille autres choses autrement plus puissantes qui pour le moment me donnent le vertige) utilisé pour naviguer dans OpenSimulator, donc. J’ai appris par la suite qu’il existait un viewer plus perfectionné qui s’appelle Firestorm, mais je préfère vous prévenir qu’il est beaucoup plus gourmand en ressources, et si comme moi vous avez un PC « vieux tacot » (c’est-à-dire, en gros, de plus de six mois d’âge) mieux vaut ne pas se séparer de son Imprudence (c’est dingue, j’ai un mal fou à me faire à ce nom !).
Quand l’auteur de ces lignes se sent une âme de pionnier…
Armé de toutes ces infos (que je suis allé glaner tout seul comme un grand, en fouinant sur le net) je me suis équipé de mon… Imprudence, donc, et je me suis mis en tête de maîtriser un peu la bête, histoire d’avoir l’air un peu moins « bête », précisément, lors de mon « arrivée » sur les lieux (je crois que je vais arrêter de mettre des guillemets, j’imagine que ça doit irriter au plus haut point les aficionados 🙂 )
Par le truchement de mon avatar (que j’avais miraculeusement réussi à créer) je suis donc arrivé sur le lieu de la conférence quelques heures avant, pour y découvrir un super auditorium désert, mais extrêmement bien équipé (en même temps, vu que c’est du virtuel, je me disais qu’ils auraient tort de se refuser quoi que ce soit). J’ai ainsi pu découvrir qu’il y avait un écran géant (mais bon, vu les proportions de ma fenêtre ça revenait en gros à visionner une vidéo sur YouTube, ce qui est plustôt sioux à bien y réfléchir…), écran sur lequel une présentation avait été installée. En bricolant un peu j’ai fini par découvrir qu’il était tout à fait possible de faire défiler les slides de ladite présentation. Je reconnus d’ailleurs immédiatement la patte de mon ami Marco, et mine de rien je pus à cette occasion me familiariser tranquillement à l’avance avec ce dont il allait être question (cela constituait un genre d’ancrage, si on veut). J’ignore totalement si c’était fait exprès, mais qu’importe, le fait est là, et mérite largement d’être salué… et exploité !
Par la suite je suis sorti de la salle de conférences pour me dégourdir les neurones et tenter d’assimiler des rudiments de… appelons ça « pilotage d’avatar » (cela me rappelait les cours de conduite « pirate » de mes aînés tentant de m’initier au maniement automobile en terrain vague à l’époque des mes jeunes années). Le moment venu, à l’heure dite, j’avais bien l’intention de retourner dans la salle… pour assister bel et bien à la conférence en temps réel.
Une tranche de vie : le déroulement de ma première e-conférence (…comme participant)
Pour une surprise ce fut une surprise ! La salle était noire de monde, remplie d’avatars aux aspects et vêtements multiples, et parfois inattendus. Par exemple dans un des fauteuils il y avait une… euh, disons créature, en forme de fumée rose qui n’était pas sans rappeler le film d’animation Aladin…
A l’entrée de la salle je fus très gentiment accueilli par Khéops, une adorable avatarette qui semblait accueillir tout le monde… je trouvai (non sans difficulté) une place au dernier rang, et parvins enfin à m’asseoir.
Quelque temps plus tard le maître de cérémonies prenait la parole, remerciait tout le monde d’être venu, parlait des autres manifestations à venir, et présentait finalement Marco. Et moi dans mon (vrai) fauteuil en face de mon PC, je me pinçais pour me persuader que je ne rêvais pas !
Lorsque Marco prit la parole, je fus pris par son histoire, et peu de temps après, ma voisine de droite (dans la salle virtuelle) me demandait d’être son ami (…par le biais d’un tchat interne, oh et puis zut, je ne vais pas m’étendre sur tous les détails, vous n’avez qu’à essayer vous-mêmes après tout, si j’y suis arrivé, je suis tranquille que vous pouvez le faire aussi !).
J’acceptai avec joie, et par la suite je découvrais qu’il s’agissait d’une personne qui tout comme moi venait ici pour la première fois, et qui avait été amusée de mes essais maladroits et de toutes les vannes que je m’étais amusé à lancer par le biais du tchat interne. Depuis j’ai découvert que ma voisine était Yasmine Kasbi. Faites donc le pitre, vous ferez des rencontres magnifiques !
A la fin de la conférence, il y eut comme dans la vraie vie la traditionnelle série des questions du public, certaines se faisaient par tchat interne, d’autres en utilisant les microphones que beaucoup d’utilisateurs possèdent (ne serait-ce que par le biais de leur webcam…).
Ensuite, certains sont allés se réunir pour discuter (autour d’un endroit appelé point d’eau, ou quelque chose comme ça…). Pour ma part j’ai préféré m’éclipser, en suivant le cortège des avatars qui gravissaient lentement les marches de l’amphi et partaient en s’envolant (ah oui, parce que j’ai oublié de vous dire, on peut faire plein de choses en virtuel, y compris prendre son envol !).
Retour d’expérience (…à tête reposée)
Il me faut bien avouer aujourd’hui que je suis ressorti de cette expérience avec un sentiment étrange : celui d’avoir été immergé dans une extraordinaire machine à fabriquer des souvenirs. Aussi étrange que cela puisse paraître, mon souvenir de cette soirée est bien particulier, unique. Non pas de la manière dont on pourrait se souvenir d’un livre qu’on a lu, ou même d’une vidéo qu’on visionne… mais pratiquement comme un événement auquel j’ai vraiment assisté… participé ! Et je ne peux pas m’empêcher de penser à toutes les implications et possibilités que cela ouvre dans le domaine de la formation et de la pédagogie. Imaginez : il y avait dans cette salle une bonne cinquantaine de personnes venues du monde entier mais qui n’avaient pas quitté leur « home, sweet home » ! Et j’espère bien ne pas être brûlé en place publique si j’affirme que nous avons partagé ensemble des souvenirs très forts ! Quand je pense que le lendemain, sur France Culture (…qui n’est tout de même pas ce qui se fait de plus ringard) , j’entendais un présentateur nous annoncer sans rire dans son émission que tel participant au débat du moment se trouvait dans une ville distante mais qu’en gros ça le faisait quand-même grâce à « la magie des ondes », je me dis que décidément, le 21e siècle est une terre de contrastes, et surtout que nous ne sommes pas au bout de nos peines.
Un bémol (ou plutôt une inquiétude)
Voilà. J’ajoute que depuis lors j’ai le très net sentiment d’avoir mis ce soir-là le doigt dans un délicieux engrenage, et que les dimensions pédagogiques des mondes virtuels me semblent promises à un brillant avenir. Seul bémol, ou plutôt inquiétude : je me demande vraiment si le monde qui nous entoure est prêt à accueillir tout ça, en d’autre termes si tous ces gens si passionnés et si passionnants n’arrivent pas un peu trop tôt (auquel cas ils risquent d’être plus ou moins durablement ostracisés par les autres, sous l’air bien connu de « Je vous l’avais bien dit, ma pauv’ dame, ils sont pas comme nous ces gens-là… »).
…Pourquoi pas vous ?
Aujourd’hui je pense avec délectation à mardi 2 avril, d’abord parce que ce sera le jour de mon anniversaire, et ensuite parce que j’ai un rendez-vous à 21h30 sur Francogrid. Il s’agit d’une conférence consacrée au thème « pédagogie et mondes immersifs », ce qui, avouons-le, tombe tout simplement à pic !
Pour afficher les détails de l’événement il vous suffit de cliquer ici, ou encore sur l’image au début de cet article. Je vous en reproduis ci-dessous le descriptif :
Dans le cadre du cycle de rencontres Pédagogie et Formation sur Opensimulator que MétaLectures accompagne cette année, Yann Minh interviendra mardi 2 avril à 21h15 sur Francogrid – MétaLectures, sur le thème :
Pédagogie augmentée « Pratique d’une pédagogie dématérialisée à base de jeux vidéo et d’avatars dans les mondes persistants »
Depuis 2003 Yann Minh utilise les jeux vidéo dans un cadre pédagogique de grandes écoles pour enseigner l’histoire de l’art et des sciences, à l’aide de niveaux du jeu Unreal Tournament, de mondes persistants dans les open sims et Second Life et d’applications WEB 3D basées sur le logiciel Unity3D.
Dans cette conférence dématérialisée sur MétaLectures, Yann Minh décrira en détail les expériences et techniques pédagogiques dématérialisées qu’il a exploré, en particulier les techniques d’Ars Memorativa adaptées aux mondes dits virtuels, et aussi il montrera comment utiliser la version libre de son NøøMuseum, pour créer relativement facilement un espace 3D virtuel personnalisé, pour un projet pédagogique, pour des utilisateurs n’ayant pas de compétences en modélisation 3D.
Si cela vous dit, ou si vous êtes tout simplement intrigués, je vous invite à vous plonger, tout comme je l’ai fait, dans cet univers si étonnant. Pour tirer sur le petit bout de fil qui déroulera tout le reste et vous permettra de nous rejoindre, c’est très simple : il suffit de se rendre à l’adresse ci-dessous, tout y est expliqué (c’est d’ailleurs ainsi que j’ai moi-même procédé pour me mettre le pied à l’e-étrier !).
http://metalectures.blogspot.fr/p/pour-acceder-lile-3d-metalectures.html
Voilà. Bonne découverte et, je l’espère, à mardi prochain !
Bien à vous,
Bernard
—
PS : Depuis l’écriture de cet article, je me suis rendu au rendez-vous, puis fendu d’un… disons d’un compte-rendu assez particulier dans l’article d’après…
PPS : Si vous êtes vous-même branché Mondes Virtuels et que vous décelez la moindre approximation, la moindre maladresse, petite ou grosse, voire une ou des inexactitudes dans les propos ci-dessus, je vous invite à laisser un commentaire. Après tout ils sont aussi faits pour cela !
PPS de dernière minute : à lire absolument, interview d’Arlette Fétat, auteur, scénariste BD, livrant ses premières impressions sur les mondes virtuels.
43.636730
5.635316
Vous avez aimé ? Partagez donc ceci sur...
Publié dans
.,
Apprendre Mieux,
étonnant,
pédagogies actives et tagué
Apprendre mieux,
développement personnel,
Mieux-Apprendre,
pédagogie et développement personnel,
pédagogies actives,
pédagogies décalées,
second life,
yann minh